lundi 22 janvier 2007

"Chez Nous"


C'était le jour de mon anniversaire et ma mie avait décidé que nous irions au restaurant. Nous avions vu quelques semaines plus tôt dans une diffusion de TéléTourisme consacrée à Liège qu'il existait quelques restaurants lovés dans les impasses, les ruelles et les coteaux. Notre curiosité était éveillée, et comme toujours c'est elle qui mit la machinerie en route.

Un voyage dans le temps... voilà sans doute une des impressions qui subsistent après un repas dans cette auberge contemporaine cachée dans les ruelles tortueuses du vieux Liège. Mais que l'on ne s'y trompe pas, le terme auberge n'a rien de péjoratif ici, mais il participe au tableau d'impression qu'offre le lieu.

Une rue en pente, étroite, aux pavés inégaux, suivie par des escaliers abruptes et un chemin de pénombre, mènent à une maison typique du coeur de la Cité Ardente. Une plaque aux lettres élégantes nous rassure: nous sommes bien devant le restaurant "Chez Nous". Il ne nous reste plus qu'à franchir le portail pour être accueilli par la chaleur et le parfum des épices.

S'en suit une salle tout en longueur d'où se dégage une atmosphère rustique et chaleureuse renforcée par les lumières mouvantes de dizaine de bougies. Quelques éléments de mobilier agreste apportent une touche finale au tableau. Voilà un havre en dehors du tumulte d'une ville moderne bien que serti en son coeur.

Une fois à table, le voyage se poursuit ! Le décor de table, les couverts à l'aspect brut et pourtant raffiné, les plats au reflet d'antan, les carafes et les cruches, etc. Il ne manquait plus que les demoiselles officiant en salle soient déguisées en Nanesse.

Tout cela est bel et bon me direz vous, mais voyager dans le temps cela creuse l'appétit ! Mais voilà, il n'y a pas de carte. Chez Nous offre un menu unique, accompagné ou non d'une sélection de vin, mais renouvelé tous les mois. Mise en bouche, entrée, plat, dessert, café et mignardise; voilà le programme de la soirée.

Et c'est alors que le voyage reprend. Chaque plat est une alliance entre un raffinement moderne et une simplicité d'autrefois, une sorte de poésie impossible scandée avec art par le chef. Foie gras, champignon, poisson, gibier sur pain d'épice, gigue de légumes anciens biscornus, fruit compoté, crumble de fruits secs, etc. Le pain à lui seul mérite un détour. Il est servi en tranches épaisses ; sa mie est ferme et moelleuse et sa croûte savoureuse et croquante comme un biscuit.

Tout est parfait à l’exception peut être de la sélection de vin. Elle ne soutient pas la comparaison avec les plats.

Dans la plupart des restaurants que nous avons visités, le périple du repas se termine souvent de façon brutale à cause du café (comme le disait l'agent spécial Dale Cooper: the true test of any hotel, as you well know Diane, is that morning cup of coffee) Il manque généralement d'arôme et de goût, sans parler de l'aspect... si l'on peut voir le fond de la tasse, il n'est toutefois pas possible d'y lire l'avenir. Mais voilà, l'espresso qui nous est servi est un véritable délice: crémeux, opaque, puissant et subtilement amer.

Voilà, le voyage touche à sa fin. L’addition arrive dans un pli cacheté, libérant notre escarcelle de quelques sequins électroniques. Il faut déjà partir et rejoindre une autre époque...